Prélude au rêve

[WARNING: Attention, si vous n'aimez pas les ambiances psychédéliques, ou bien les topics très dirigés, alors ceci n'est pas pour vous. Les posts qui vont suivre risquent d'être particulièrement loufoques et orientés énigme. De plus même si ça risque d'être dur il aurait mieux valu que le perso pour ce topic connaisse Ayame... Ca aurait été plus facile et plus intéressant. Voilà Razz

. Dernière info: je vais masteriser ce topic du début à la fin, son fonctionnement est un peu spécial]

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Hokubu, au crépuscule. La lumière du jour commençait à rendre l'âme. Le soleil, à l'agonie, déversait sa lumière sanglante à grand flots. Elle baignait la cité, emplissait ses veines d'une vie glauque, vibrante... Quelque chose rendait l'air électrique. Peut-être les sirènes de pompiers qui continuaient encore maintenant de retentir aidaient à donner au paysage un air... apocalyptique. Quoiqu'il en soi, c'était ce genre de soirées où l'on avait l'impression qu'il allait se passer quelque chose.

En s'enfonçant dans les rues de la ville, on pouvait constater que cette lumière rouge n'épargnait rien, ni personne. Seuls quelques recoins d'ombre parvenaient à se libérer du joug de l'onde malsaine. Rouge, et noir. Au croisement d'une rue, on pouvait constater que quelque chose rendait le sol et les murs plus rouges encore... C'était là une lueur brève, répétitive, qui changeait d'intensité régulièrement. Le fruit d'un quelconque reflet? Un effet d'optique.

Rien de tout ça, loin de là... La lueur semblait émerger du dessous d'un escalier. Et vu sa puissance, il ne devait pas s'agir de celle qu'aurait émis le ver luisant lambda. Celui qui daignerait se baisser constaterait la présence de ce qui ressemblait à... une grosse larme rouge, lisse, et chaude. Elle avait une couleur cristalline. On l'aurait cru liquide... Et elle ne ressemblait à rien qui soit "terrien". Elle tenait dans le plat des deux mains... Ou bien dans le plat d'une seule à condition de la garder en équilibre. Un nouveau mystère, dans cette ville qui en regorgeait plus que de mesure..?

Esmé pressa le pas, abandonnant sa contemplation morne du soleil qui se couchait à l'horizon, embrasant la terre d'une lueur particulièrement écarlate ce soir là. Elle aurait dû rentrer plus tôt, au lieu de passer son après-midi à la librairie, à regarder tout les livres qu'elle aurait pu s'acheter, si tant est qu'elle ait eu assez de sous, sans compter les mangas qui lui faisaient de l'oeil, de façon plutôt vicieuse. Et puis il y avait ce livre de math qu'elle avait dû commander, ainsi que le roman que cherchait déséspérement son père depuis un moment. Il faut dire que c'était un ouvrage français qui n'avait pas de réelle portée internationale, alors pour le trouver au Japon, il fallait tout de même s'accrocher. L'apercevant du coin de l'oeil alors qu'elle allait quitté les lieux après avoir effectué sa commande, elle hésita un très bref instant puis alla l'acheter, abandonnant l'idée de prendre des mangas ou même de rentrer tôt.

En y repensant, la brunette fronça les sourcils. Un hasard pareil, c'était tout de même assez surprenant, il fallait avouer. Mais bon, Hokubu étant une ville cosmopolite, il devait sans doute être plus facile de trouver des produits d'imports venant tout droit d'Europe. Cela dit, ça n'empèchait pas qu'il se faisait tard, et qu'il valait mieux qu'elle rentre maintenant sur le campus. En plus, elle avait un exposé à finir, qui heureusement n'était pas pour demain, mais quand même. Oui, étant donné qu'Esmé ne sortait pas beaucoup en dehors de ses promenades solitaires et autres nécessités, elle avait bien assez de temps pour travailler et ainsi commencer son travail en avance, ce qui n'était pas un mal.

Peut être devrait-elle en profiter pour courir un peu, mais bon, elle ne portait pas une tenue de sport, et son jean était loin d'être adapté à un tel exercice. Elle continua cependant son chemin, songeuse, allongeant ses foulés.

A vrai dire, quelque chose en elle la poussait à ne pas s'attarder dans les parages. Peut être était-ce cette lueur rouge qui semblait venir d'un escalier, à peine en contrebas du chemin qu'ele suivait....

Titiller par sa curiosité, elle s'approcha doucement de l'endroit en question, et s'accoupit alors pour observer ce qui produisait une telle lumière, bien trop puissante pour une bête luciole (bien ques les lucioles soient nos amies).

C'était une espèce de flaque rouge, semblable ç une larme, le tout translucide. On aurait dit du liquide....Esmé approcha sa main de la surface, la touchant du bout des doigts. C'était bizarement chaud et...

La puissance de la larme faiblissait, semblait-il. Sa lumière vacillait doucement, comme au bord d'une douce agonie. C'était sans compter le destin qui ne lui laisserait pas le temps de s'évaporer, et de happer, d'emprisonner dans l'oubli son mystérieux contenu. Une main peu prudente s'aventura sur sa surface qui si elle était en apparence lisse était en fin de compte une véritable éponge à énergie...

Il y eut un halo de lumière rouge, aveuglant. Esmé fut entourée par l'onde brûlante. Elle eut sans doute eu l'espace d'un instant l'impression de se changer en torche humaine. Mais la douleur et la panique laisseraient sans aucun doute bientôt place à la perplexité. Les lois physiques semblaient progressivement perdre le contrôle de leur territoire. On y voyait plus rien. Esmé pu se sentir flotter, comme si plus rien n'existait autour d'elle. Bientôt, c'est son corps entier qui donna l'impression de s'étioler. Elle n'était plus qu'une conscience... Plus que des yeux invisibles, qui exploraient un univers fait de flux d'énergie rouges et blancs.

Une fraction de secondes plus tard, cette sensation disparaissait. Esmé eut l'occasion de se rendre compte qu'elle avait la tête à l'envers. Ses pieds touchaient un sol qui était un plafond... Elle tomba, et se heurta à une sorte de matière molle, élastique, proche à la fois du latex et du coton. Tout était gris... Un gris indescriptible. Elle était dans une sorte de sphère peut-être de deux à trois mètres de rayon. La sphère était toute faite de cette même matière grise. Des tunnels étaient creusés sur ses parois. L'un d'eux était au plafond. Des paillettes d'or, évanescentes, voletaient à l'intérieur de ce dernier. Une lueur vacillante, à peine colorée, éclairait les parois de chacun des six autres tunnels. Carmin, azur, pourpre, émeraude, et cuivre. En retrait, un huitième tunnel éjectait une sorte de matière noire, d'allure inquiétante. Ces huit orifices étaient vraisemblablement les seuls accès de cette pièce sphérique... Il allait falloir faire quelque chose.

Mais on pouvait bien se demander ce qu'il se passait. Ici, tout semblait onirique. Les mouvements, ralentis. Les sons, étouffés, et pourtant résonnants. Qui plus est, Esmé ne transportait plus rien sur elle... Ses habituels vêtements avaient été troqués contre une tunique informe, longue, de la même couleur exactement que celle des murs de cet endroit glauque, si ce n'est malsain. Des bruits étranges provenaient d'on ne savait trop où... Comme des pleurs, ou bien des cris, ou bien... quoi donc? En tous les cas, impossible de savoir si ce son était féminin, masculin, ou même animal... Il glaçait les sangs.

Au contact de la dite larme, Esmé fut ébluie par une vive lumière vive, avant d'être plongé dans un océan de flamme. Elle allait hurler alors que ses chairs se consumaient mais tout s'arrêta aussi rapidement que ça avait commencé.
La jeune fille n'eut pas le temps de comprendre ce qui lui arrivait quelle se retrouva suspendu dans une sorte de néant parcouru par des fluides d'énergies dont le but et la signification échappait sans conteste à sa perception.

"Que...?" Les mots éclatèrent comme une bulle aux abords de sa conscience, alors que son propre corps semblait s'estomper, se dissoudre fans cet espace régit par des lois incompréhensibles. A moins qu'il n'y ait pas de lois, tout simplement.

Esmé ferma les yeux. Enfin, c'était ce qu'elle souhaitait faire, à présent. Elle eut la vague sensation de ses paupières recouvrant ses globes occulaires, mais peut être que tout ceci n'était rien d'autre qu'une vue de l'esprit, une chimère crée par son cerveau pour parer aux incohérences de ce qu'elle avait vu. Cela ne pouvait pas être réel. Rien de ce qui n'existait sur terre ne ressemblait à ceci. Etait-ce une illusion ou un rêve? se demanda-t-elle vaguement, au bord de la nausée, alors qu'elle tombait.

Elle tombait....? Oui, d'avord au plafond, il fallait maintenant qu'elle tombe. Elle chuta donc et attérit sur une matière caotchouteuse, grise. Oui entretemps, elle avait ouvert les yeux, cette sensation de ne plus être qu'un esprit ayant disparue.

Désormais Esmé était allongé sur cette chose grise et molle qui formait une sphère. Elle se releva, et s'aperçut qu'elle ne portait plus qu'une espèce de tunique grise elle aussi.

"Mais qu'est ce qui se passe bon sang??" s'écria-t-elle, la colère prenant un instant le pas sur la panique qui menaçait de l'envahir. Déjà, son coeur battait plus vite, sa respiration se faisait saccadée, une sueur fine et froide couvrait peu à peu son dos.

Et les sons étaient étouffés, constata-elle en entendant sa voix bizarrement étouffée. Fronçant les sourcils, elle observa les huits tunnels colorés, décidant arbitrairement d'éviter le noir, qui ne lui inspirait rien qui vaille. Il faudrait sans doute en emprunter un pour sortir. Et évidement, il n'y avait pas de panneau indicateur, songea-t-elle ironiquement tout en se mordant la lèvre inférieur avec force. Esmé inspira profondément une fois, deux dois et soupira, avant de passer une main nerveuse dans ses cheveux, comme à son habitude lorsqu'elle était stressée.

Enfin là, elle aurait pu très bien commencer à paniquer, mais il valait mieux qu'elle se maîtrise. Dans ce genre de situation, mieux valait garder un minimum de sang-froid. Qui sait ce qui pouvait ENCORE se produire.
Esmé ferma les yeux, les gardant bien clos, comptant jusqu'à 10, et les rouvirt. Non, rien n'avait changé. Les pailettes continuaient de tomber du "plafond", l'espèce de fumée noirâtre se deversant toujours de son tunnel, les autres parfaitement semblables à ce qu'ils avaient été. Elle se pinça aussi le bras, histoire de dire. Bon, pas plus d'effet de ce côté là.

Pour sortir, il allait sans doute falloir qu'elle emprunte un tunnel. Mais lequel menait à la sortie, ou du moins, quelque part?
Esmé pouvait sans doute éliminer le doré, qu'elle avait peu de chance d'atteindre, avec le noir. Il ne restait "plus" que le carmin, l'azur, le pourpre, l'émeraude, et le cuivre. Bon ça faisait quand même pas mal d'options. Percevant enfin les sons auxquels elle n'avaient pas prêté attention tout d'abord, elle se raidit. Ses yeux s'écarquillèrent alors qu'elle frissonnait, la peur se lisant peu à peu sur son visage.

"Il y a quelqu'un...?" demanda-t-elle, apeurée. Elle n'avait pas vraiment envie de rencontrer ce quelqu'un, si c'était de lui qu'émanait les pleurs et autres cris peu réjouissants. Elle s'approcha du tunnel le plus proche, l'azut afin d'écouter pour voir si ça venait de là, tout en jetant un regard soupçonneux au noir, qui décidement ne l'inspirait pas des masses.

Le cri d'Esmé se perdit dans le tunnel aux reflets bleus comme si il avait été fait d'une matière molle, et absorbante. Quelques secondes plus tard, elle eut l'occasion d'entendre comme l'écho de sa voix, lui revenant. c'était bel et bien sa voix... Pourtant elle était comme déformée. Un peu plus grave. Un peu plus lente. Sa question s'étaient transformée en complainte.

Rien ne se passa de plus. Enfin... Du moins pas de suite. Esmé était proche du tunnel. Elle pouvait sentir comme de l'air passer... Le tunnel aspirait l'oxygène présent dans la "sphère". Et d'un coup, l'aspiration se fit plus forte. La pièce entière se contracta comme dans un battement de cœur. Un son grave, assourdissant, résonna jusqu'à envelopper la jeune femme. Tout bascula. Elle eut l'occasion de se sentir comme aspirée par ce bruit sourd, résonnant. Une vague lueur bleue... Elle était passée dans le tunnel azur, lequel semblait l'avoir happée.

Une roulade plus tard, elle avait atterri dans un long tunnel blanc. sa tunique grise avait changé de couleur, de telle sorte à prendre celle des "murs", qui s'avéraient être faits toujours de cette même matière élastique et molle tout à la fois. Les parois du mur bougeaient. A certains endroits, ce qui ressemblait à des bras et mains géants déformaient la paroi élastique. Crispées, les mains happaient l'air, comme à la recherche de quelque chose... de quelqu'un? Ou bien d'aide? Leur mouvement trahissait la peur, voire l'égarement. Deux personnes étaient assises dans ce couloir éblouissant. Deux hommes. Le premier avait la tête calée contre le mur. Les bras ballants. Mince, plutôt grand. Il avait de longs cheveux noirs, coiffés de manière relativement excentrique. Il ressemblait un peu à ces chanteurs de J-rock sur lesquelles les lycéennes ne manquent pas de baver... d'ailleurs, les quelques bijoux qu'il portait renforçaient cette impression. Il portait l'uniforme d'Hokubu. D'ailleurs, Esmé pouvait très bien le connaître, puisqu'il s'agissait d'un élève de l'université qui avait disparu il y avait quelques semaines de cela. Kureno Takahashi, de son nom. Ses yeux azur observaient le plafond d'un air absent. On pouvait encore se demander si il s'agissait vraiment de lui... Il avait l'air aliéné. Et l'autre homme n'était pas beaucoup mieux...

L'autre avait les coudes sur les genoux. Il regardait quant à lui le sol. Il avait un teint basané, et de courts cheveux d'argent. Ses yeux d'un vert électrisant semblaient à peine humains, trop colorés pour être vrais. Ce qui ressemblait à une boule de... matière noire? Bref. Une sphère noire tournait autour de lui. Elle avait deux petits yeux rouges. Elle semblait avancer machinalement. Le tunnel qui avait mené Esmé à cette pièce avait disparu. Par contre, tout au bout de ce couloir étrange, une porte trônait. Fallait-il encore voir si elle était facile d'accès... vu tous les obstacles qui séparaient Esmé de cette dernière.
Drôle de situation si il y en était...

Alors qu'elle était penché après du tunnel azut, l'écho de sa voix lui revint, comme plaintive et plus grave. Esmé plissa les yeux, les rétrécissant à deux minces fentes d'où le gris bleu perçait encore. Sa bouche se tordit en une grimace alors que son visage se crispait en une expression de colère. Elle avait vraiment l'impression qu'ici, quelqu'un se fichait d'elle. Elle faillit laisser échapper un "bande d'idiot" dans le vide, mais cela n'aurait sans doute pas eu beaucoup d'effet, et à vrai dire, elle craignait d'entendre parvenir une réponse de l'un des tunnels, l'azur ou les autres, sais-ton jamais. Une réponse comme "C'est toi l'idiote" d'un ton grinçant et sinistre. Esmé s'accorda un léger soupir, fermant les yeux un instant tout en s'accordant un moment de répit.

Soit elle devenait folle, soit tout ceci n'était rien d'autre qu'un cauchemar...A moins qu'il n'y ait une autre explication, qui pour le moment, ne daignait pas se faire connaître.

"Hé !!!" s'écria-t-elle alors qu'elle se faisait aspirer par le tunnel, bien malgré elle, le tout ponctué par un son grave, assourdissant, qui résonnant dans son corps....Un peu comme un battement de coeur. A croire qu'elle n'aurait pas dû relâcher son attention. Alors qu'elle se faisait aspirer, elle eut l'occasion de voir la lueur bleue qui l'entourait. Bon apparement, elle se dirigeait vers la sortie de ce tunnel. Etait-ce un mal, était-ce un bien? A vrai dire elle ne savait pas du tout si ça changeait quelque chose, et si c'était une chance ou non. Cela dit, dans tout les cas, elle ne se sentait pas franchement rassuré, et si elle s'était tenue sur ses deux jambes, celles-ci auraient sans doute tremblé.

A peine cette pensée fut-elle formulé dans son esprit, qu'elle roula à terre, finissant sa chute dans un long tunnel blanc, dont les murs semblaient bouger. Elle se releva tant bien que mal, un peu sonné par cette atterissage brusque. Ca lui rapellait sa rencontre avec Junzo tiens...Sauf que le jeune japonais n'avait sans doute aucun rapport avec tout ça, ce qui était sans doute mieux pour lui, même si elle aurait trouvé sa présente rassurante dans un tel lieu. En même temps, n'importe qui d'un peu familier l'aurait aidé à reprendre pieds, parce qu'alors elle aurait pu se focaliser sur autre chose. Bon bien sûr, en admettant que quelqu'un qu'elle connaissait ait eu la même idée stupide qu'elle, qui consistait à toucher un truc bizarre qui traînait par terre. Ce dont elle aurait sans doute pu se passer, si c'était bien l'élément déclencheur de son arrivée ici.

Bien sûr, Esmé espérait toujours qu'il s'agisse d'un rêve, mais elle se trouvait étonnement lucide pour quelqu'un qui dormait. D'ordinaire, elle ne se serait étonné de rien et aurait peut être même su ce qu'elle trafiquait ici. A moins qu'il ne s'agisse d'un cauchemar, mais la jeune fille ne faisait pas vraiment ce genre de cauchemar. Ceux-ci concernait d'autres domaines de son existence, et n'était pas aussi "psychédélique".
Quoique ce n'était peut être pas le mot.

Curieuse comme toujours, qui état sans doute un de ses traits de personalités les plus forts, elle s'approcha des parois et recula bien bite et voyant des bras s'agiter.

"Waaah mais qu'est ce que c'est que ces trucs ??" s'exclama-t-elle une nouvelle fois, avant de prendre la fuite, par mesure de précaution.

Sa course éperdue fut stoppé nette lorsqu'elle arriva au bout du couloir. Deux hommes s'y trouvaient, masquant en partie une porte, qui pouvait être la sortie. Le brun lui rapellait quelqu'un, d'ailleurs il portait l'unifrome de l'université...Bon elle ne se souvenait pas d'avoir déjà parlé avec lui, mais ils s'étaient déjà croisé dans les couloirs.
Kureno Takahashi....Oui, ça devait être son nom. Elle se souvenait que quelques filles de sa classes étaient souvent en train de baver sur lui, faut dire vu son look, il devait attirer les midinettes...Cela dit d'après ce qu'elle avait compris, il sortait avec une fille, une certaine Aya quelque chose....Son nom lui échappait. Mais à Hokubu, ça faisait des semaines qu'on ne les avaient pas vu. Si ça se trouve, il était piegé là depuis tout ce temps? Peut être oui...mais son expression vide ne lui indiquait rien qui vaille.

Quant au troisième larron, elle ne l'avait jamais vu. Vu son look elle s'en serait souvenue, parce que des cheveux argents et des yeux verts éléctriques, ça ne s'oublie pas en général. C'était peut être une star Visual quelque chose aussi? Elle ne voyait que ça qui pouvait expliquer un look pareil, en fait.
Par contre la sphère noire...heu....

*Hum, réfléchis Esmé. Quelle attitude adopter? Je les ignore et je passe la porte? Mouais, ça m'étonnerait qu'ils me laissent passer comme ça...Il va falloir entamer la conversation alors? Ouais. Je sens que ça va être un grand moment d'anthologie. J'espère au moins que ce n'est as une caméra caché, sinon bonjour la honte. *

"Heu...Salut?"
*Ouah quelle entrée en matière incroyable! J'en arriverais presque à me surprendre moi même*

"C'est...c'est par ici la sortie?" demanda-t-elle en tentant un sourire crispé, un partie de ses mèches brunes retombant heureusement sur son visage, masquant en partie sa gêne.
Et bien, elle était pas sortie de l'auberge, comme dirait nos amis les français!

Dans cette pièce, les sons n'étaient plus étouffés. Au contraire, tout semblait résonner, comme si le couloir avait été extrêment grand, et vide. Le jeune homme identifié comme Kureno Takahashi baissa lentement les yeux au moment où Esmé lui adressait la parole. On aurait cru une scène au ralenti. Les deux hommes en présence n'étaient pas loin de ressembler à des zombies, oui. Des zombies. Les salutations de la jeune femme se perdirent dans le vide, puisqu'elle n'eut droit à aucune réponse. Le regard bleu du jeune homme était vide. On aurait cru qu'il n'avait aucune âme. D'ailleurs... peut-être était-ce le cas, non?

"La sortie...? Y a t-il une sortie? Il n'y a qu'elle qui le sâche... Tout est de sa faute..."

Un ton doux... Des paroles mornes, plates. A se demander si il répondait machinalement, ou bien si il pensait vraiment ce qu'il disait. Derrière Esmé, un troisième personnage semblait être apparu. Il était debout, derrière elle. Une voix de jeune femme lui parvint, lui indiquant la présence de ce... troisième zombie?

"Si tu la trouves tu trouveras peut-être la sortie, aussi... Je ne sais pas si tu peux passer cette porte."

En se retournant, Esmé aurait l'occasion de voir qu'elle avait face à elle une jeune étudiante rousse. Elle était nouvelle, elle venait d'être transférée. D'aucun savait qu'elle venait d'Irlande, et qu'elle était aussi la soeur de cette Aya truc chose, la petite amie de Kureno Takahashi. Elle s'appelait Imako Keita, si Esmé s'en souvenait... et si elle avait eu les oreilles assez ouvertes pour entendre parler de cette histoire. L'homme aux cheveux d'argent, toujours assis dans son coin, sortit enfin de son mutisme.

"Mais où est-elle?"

De nouveau, la voix de Kureno:

"... Elle n'a plus accès à nous."

Puis Imako:

"Des désirs égarés... "

Etrange... Des paroles sybilines. Les trois autres semblaient partager la même pensée, comme si ils n'avaient en réalité été qu'une seule entité. Puis un murmure, comme venu de nulle part. Un murmure double... Celui d'un homme, et celui d'une femme. On sentait dans leur ton la fatigue... la tristesse. Peut-être un certain désabus, aussi.

"Taisez-vous..."

Ces paroles transportaient des sentiments, comme si une quatrième présence s'était approchée assez près d'Esmé pour qu'elle puisse capter ce qu'elle ressentait. Elle eut sans aucun doute l'occasion de capter, l'espace d'une seconde, quelque chose de désespérant, d'absolument abominable. L'impression d'avoir tout perdu. Le sentiment d'une identité morcelée, perdue. Une haine intense que cette entité se vouait à elle-même, et la peur de perdre le contrôle de... quoi? Une double identité? Quoi qu'il en soit se sentiment s'estompa, quoi qu'il restât là, quelque part, dans cette pièce... cette cinquième présence semblait différente des autres... Mais où était-elle?

Quoi qu'il en soit, les autres l'avaient écoutée, cette voix. Ils s'étaient tus. Le peu de vie qui les avaient animés était partie. Ils étaient à nouveau immobiles. Les deux hommes par terre, et la jeune fille, debout. Les bras sur les murs étaient sur Kureno... Ils happaient ses bras, entouraient son visage, comme prêts à l'engloutir. L'homme basané ainsi que la boule noire qui tournait autour de lui devenaient transparents, comme si il n'avaient été ici que de moitié. C'était totalement surréaliste.

Étrangement ici, les sons résonnaient alors qu'avant, lorsqu'elle se trouvait dans cette espèce de sphère grisâtre, les bruits se trouvaient étouffés, comme noyés dans de la ouate ou du coton, ou tout autre substance qui avait la fâcheuse habitude d'absorber les sons. Toujours est-il que les deux zigotos ne lui avaient pas répondu, à croire qu'elle parlait dans le vent. Quoique, à voir leur air tout à fait digne de zombis dans quelque mauvais film d'horreur, c'était peut être réellement le cas.

Esmé frissonna un instant, avant de se reprendre: le brun avait plus ou moins répondu à sa question....

"Comment ça, y'a pas de sortie? Oups je veux dire...Vous êtes sûr qu'on ne peut pas quitter les lieux? Et puis vous parlez de qui, au juste? "

Ouais, quand elle s'y mettait, elle pouvait devenir plutôt bavarde, cela dit, ça n'arrivait pas souvent. Fallait-il en arriver à ce genre d'extrémiter pour qu'elle daigne adressr la parole à des types pareils, en de telles circonstances? Esmé espérait que non, parce que quand même elle ne tenait pas à ce que ce genre de situations ne deviennent une habitude.
Enfin, si jamais elle réussissait à sortir de là, bien sûr.
La jeune brune ne comprenait pas vraiment ce qu'il se passait à vrai dire.

Et voilà maintenant qu'une troisième voix au ton tout aussi morne était venue se joindre à celle des deux garçons...Anxieuse, Esmé se retourna vivement.

"Que...? Imako Keita? Au fait, vous tous, vous parlez de qui au juste?"

Elle n'eut pas le temps d'ajouter autre chose qu'une dernière voix vient se mêler au choeur, à moins que ce ne soit le soliste tout simplement.

"Taisez-vous..."

Et ce fut là, telle une vague prête à l'emporter. Tristesse, souffrance, désespoir...un sentiment de perte, et la haine par dessus tout, la haine pour ce qu'elle était devenue....La jeune fille tomba à genoux, prise par surprise, comme si ses jambes n'avaient plus assez d'energie pour la porter. Elle eut envie de se rouler en boule et de hurler, hurler jusqu'à ce que cela cesse enfin, qu'on la laisse tranquille. Ses poings étaient serrés à lui en faire mal, ses ongles s'enfonçant dans sa peau. Si elle continuait ainsi, elle allait se laisser déborder...

Mais Esmé, qui commençait à suffoquer, tenta cependant de ne pas se laisser terrasser par ces sentiments qui s'emparaient d'elle. Elle, elle n'était devenue personne. Elle avait toujours eu ce don, quelque part elle le sentait, cela avait balayé tout les doutes dans son esprit. C'était étrange quand même, qu'il lui faille éprouver les sentiments d'une étrangère, ou peut être d'un étranger pour s'en rendre compte...

Prennant appui sur cette pensée, Esmé trembla encore un peu. Sa respiration saccadé se calma. Enfin elle repoussa au loin ces sentiments qui n'était pas les siens. Cela avait été vif et soudain, mais cela n'avait pas duré longtemps. Et les autres s'étaient tus. Elle se releva tant bien que mal et se dirigea résolument vers la porte.

"Bon et bien, je vais quand même essayer cette porte. Vous comptez rester ici?"

demanda-t-elle, définitivement résolue avant de poser la main sur la poignée, passant entre les deux garçon.

Pas de réponse. C'était à croire que les autres étaient réellement devenus muets. A moins qu'ils n'aient pas trouvé utile de répondre... Étaient-ils seulement capables de quitter cette pièce? Bizarrement, ils pouvaient facilement donner l'impression d'y être ancrés, d'y appartenir. C'est comme si ils n'avaient fait qu'un avec ce lieu. Et la seule des présences qui se démarquait... cette quatrième voix. Cette personne invisible... La seule qui avait réussi à émettre quelques sentiments qu'Esmé avait pu capter. Les autres en semblaient vides...

La main que la jeune femme venait de poser sur la poignée n'eut guère le temps d'y rester. Notons que même ainsi, la porte semblait fermée. Si elle avait été assez vive pour avoir le temps de tourner la poignée Esmé s'en serait rendue compte. Un des bras blancs du mur s'éjecta et attrapa le poignet de la jeune fille pour le tirer en arrière. Un deuxième bras blanc sortit du mur opposé et attrapa son second poignet, pour l'emprisonner totalement. Un peu plus et les murs allaient l'écarteler... La masse blanche s'écoula des parois jusqu'à former une flaque qui s'étala sous ses pieds. La flaque se dressa... et prit forme. Jusqu'à ce qu'elle se retrouve en face... D'elle même. Ou plutôt d'un clone d'elle-même. Le clone avait ce même regard vite que Kureno Imako et les autres partageaient. Et surtout... Détail inquiétant. Sa tunique était rouge de sang au niveau de la poitrine. Sa main était rouge aussi... et contenait un coeur sanguinolent. SON coeur.

"Où vas-tu, Esmé...? Tu sais tu devrais rester avec nous... Tu n'auras plus accès à nous si tu pars... N'est-ce pas ce que tu voudrais pouvoir faire..? Tu le voudrais n'est-ce pas? Sinon je n'existerais pas..."

La main du clone se referma sur le coeur, lequel se retrouva broyé. Elle le laissa tomber par terre dans un splosh peu ragoutant. Un sourire inquiétant se dessina sur ses lèvres.

Si Esmé n'était pas trop paniquée ni choquée par cette vision d'horreur, elle pourrait remarquer que Kureno s'était fait engloutir par le mur... Angra avait disparu, et Imako de même. Par contre, contre la porte, était apparu un couple d'individus étranges...

Il y avait un homme, et une femme. Tous deux étaient roux. Enfin... On pouvait même dire que leurs cheveux étaient rouges. Un beau rouge magenta, profond, comme il était difficile d'en obtenir un par coloration. Leurs yeux étaient turquoise. Un turquoise qui laissait croire qu'ils portaient des lentilles ou bien... Qu'ils n'étaient pas humains. Ils se ressemblaient énormément, à croire qu'ils étaient jumeaux. Enfin... Du moins on aurait pu le croire si l'homme avait eu un physique moins spécial. Sa peau était cuivrée. Ses mains, des griffes, recouvertes d'une matière noire qui avait tout l'air solide. La matière noire se tissait ensuite dans la peau de ses bras, comme un fil grossier. On en retrouvait quelques veinures sur le reste de son corps, et sur son visage. L'iris de ses yeux était une fente, comme celui des yeux d'un serpent, ou d'un chat. Leur blanc était... noir. Ce qui donnait une drôle d'impression. Au bout de ses coudes, des appendices osseux marron. Si il ouvrait la bouche, Esmé aurait l'occasion de remarquer une langue triangulaire, fine et toute noire, et des canines pointues.

La jeune femme quant à elle avait l'air humaine, au premier abord, et malgré ses couleurs de cheveux et d'yeux étranges. Elle était grande, visiblement athlétique en plus d'être vraiment bien gâtée par la nature. A vrai dire, l'homme comme la femme étaient bien avantagés côté physique, à l'exception de leurs quelques attributs démoniaques... Ils étaient nus, mais rien d'indécent étant donné la manière dont ils étaient enlacés. L'homme était assis par terre. La femme était dans ses bras, cachant toute partie intime de leurs deux corps. Ils avait les mains dans le dos de la demoiselle, tandis qu'elle encadrait la nuque de l'homme des siens. Son visage était tourné vers l'arrière, de sorte à pouvoir regarder Esmé. L'homme et la femme l'observaient. Ils avaient l'air absent. Mais ils semblaient... Vivants, comparé aux zombies précédents. Leurs yeux étaient de véritables abîmes de souffrance. D'ailleurs, ce sentiment affreux qu'Esmé avait eu l'occasion de ressentir auparavant émanait de leur personne, comme si ils n'avaient fait qu'un... Ce qui était étrange, c'est qu'une fois encore Esmé pourrait aisément les reconnaître: la femme, c'était Aya truc chose, la petite amie de Kureno et la soeur d'Imako. Et l'homme... C'était la version "démonisée" de cet étudiant transféré il y avait quelques mois. Kobayashi Kenji, un jeune homme qui n'avait pas tardé de faire chavirer les cœurs à l'université, alors qu'il n'avait clairement rien demandé.

"Qui es-tu...? Je ne te connais pas..."

La voix de la jeune femme, presque effacée. Il y avait un violent contraste entre cette vision d'elle, désespérée, et l'image qu'on pouvait avoir de l'ex-yankee au caractère de cochon, qui avait eu tendance à effrayer si ce n'est tyranniser les trois quarts des filles d'Hokubu - et même certains garçons - du temps de son... règne?

Décidément...On ne pouvait pas dire qu'ils avaient l'air partant pour quoi que ce soit, ces trois-là. A croire qu'ils n'avaient pas tellement envie de quitter les lieux finalement. Ou plutôt, aucune volonté ne les animaient, ce qui expliquait bien des choses en fin de compte. Esmé ne ressentait rien qui provenait d'eux...pas de sentiments du moins, comme si ils n'étaient somme toute que des coquilles vides, des projections de l'esprit ou peut être des illusions.
Enfin tout ce qui avait l'apparence d'un être humain, mais pas ses sentiments, de toute évidence.

Finalement, elle se demandait pourquoi elle ne s'en était pas rendue compte plus tôt. D'ordinaire, à chaque fois qu'elle était proche d'un humain, elle percevait un sentiment ou une émotion diffuse. Du genre elle savait quand ses camarades de classes étaient de bonne humeur ou non, ce genre de petite choses. Mais là, rien de rien. Hormis de la dernière personne. Réfléchissant à tout ça, elle allait tourner la poignée lorsque deux bras blancs surgirent du mur pour l'en empêcher, en toute logique.

Ils s'agrippèrent fermement à ses propres bras, manquant l'écarteler par là même.

"Hé mais lâchez moi! Je ne vous ai rien fait, alors laissez moi sortir! Aie!"
s'écria-t-elle tout en se débattant du mieux qu'elle pouvait. Elle tenta de donner un coup de pied à l'un des bras, mais cela échoua lorsque la flaque se redressa tout en prenant son apparence.

Un vrai clone, si l'on omettait ce regard vide et cette tâche rouge qui s'étalait sur sa poitrine...Attendez bon sang mais c'était SON CŒUR qu'elle tenait dans la main!

"Où vas-tu, Esmé...? Tu sais tu devrais rester avec nous... Tu n'auras plus accès à nous si tu pars... N'est-ce pas ce que tu voudrais pouvoir faire..? Tu le voudrais n'est-ce pas? Sinon je n'existerais pas..."

"Ça va pas la tête? Mais purée qu'est ce qui...se passe ici? "

Esmé eut un haut le cœur lorsque le cœur broyé alla lamentablement s'écraser par terre. Alors là, ça allait pas être possible! Elle eut envie de vomir tout ce que son estomac pouvait contenir, mais fut distraite de sa nausée par l'arrivée d'un bien étrange couple. Kobayashi Kenji et Aya quelque chose....Euh, qu'est ce que c'était que ce délire, sérieusement?
En tout cas, c'était d'eux qu'émanait les sentiments, visiblement. Esmé se crispa, grimaça un instant et recula le plus possible sans que ça ait l'air trop suspect. En même temps, en quoi son comportement pourrait avoir l'air étrange dans un endroit pareil? Mais bon, sais-t-on jamais, mieux valait prende des précautions. Esmé nota aussi, à peine envieuse combien les deux nouveaux venus étaient avantagés par la nature, c'était le moins qu'on puisse dire. Mais le fait étrange quand même, c'est qu'elle ne se souvenait pas avoir entendu parler d'un quelconque lien entre les deux "purs canons" qu'elle avait en face d'elle. Dommage, on ne voyait rien d'indécent. En comparaison de ce qui avait pu se produire précédemment, c'en était presque décevant, pensa Esmé qui se croyait en plein cauchemar.

En tout cas, si c'en est pas un, ça y ressemble drôlement.
Étonnant n'est ce pas, comment Esmé, poussé à bout, reprenait ses bonnes vielles habitudes de garçon manqué et abandonnait son côté réservé et timide.

"Qui es-tu...? Je ne te connais pas..."

*Ouais ben moi non plus je te connais pas, mademoiselle aux gros seins. Euh non, ça va définitivement pas le faire, comme entrée en matière...*

"Euh...Je ne crois pas qu'on ai eu le loisir de se rencontrer en fait. Mais je t'ai déjà vu à l'Université Hokubu. Tu es...Ayame Keita, n'est ce pas?
Moi c'est Esmé Vestrian, enchanté."

*Pendant que j'y suis, j'aurais dû rmentionner mes origines françaises et mon année. Ca fait vraiment surréaliste comme conversation....*

La jeune brune ne savait pas trop où cette conversation allait les mener, elle voulait juste partir d'ici le plus vite possible à vrai dire, et se réveiller ou oublier tout ça fissa. Si c'était un rêve, c'était sans doute le plus bizarre qu'elle ait fait. Esmé ne se souvenait pas d'avoir une telle imagination, aussi morbide qui plus est. Manquant soupirer, elle garda un sourire crispé sur le visage, espérant vaguement que ça ferait illusion. En plus elle ne faisait pas le poid face à deux personnes comme ça, dans tout les sens du terme d'ailleurs. Esmé sentit sa fichue timidité revenir au galop, et elle tenta de regarder Ayame dans les yeux avant de rougir. Et puis l'autre n'était pas en reste, avec ses muscles puissants et son allure racée.

Esmé était soulagée quelque part de ne pas être une petite pucelle tiraillée par ses hormones, parce que franchement, elle n'aurait pas su comment gérer ça. Déjà qu'elle était de nature pudique...c'était amplement suffisant.

Sans le savoir, Esmé avait eu une bonne réaction, quant à ce clone... Cette apparition, qui avait tenté de la déstabiliser. Elle avait ignoré sa présence, préférant se concentrer sur le couple assis contre la porte, et bloquant la sortie. Le clone et son sourire perfide s'étaient alors évanouis progressivement. Leur image s'était étiolée, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus rien. Un désir, un rêve que l'on ne nourrissait pas, ne vivait pas bien longtemps...

Comme le clone n'était plus là, et que Esmé répondait à cette Ayame, qui tout comme son homologue masculin avait l'air particulièrement à l'ouest à l'heure actuelle... Les murs perdirent de la poigne, pour ainsi dire. Les regards des deux roux s'emplissaient de doutes, en même temps que les mains blanches des parois relâchaient leur étreinte. Bientôt, Esmé eut l'occasion de dégager ses poignets. Puis les mains géantes se rétractèrent et retournèrent en compagnie des autres, qui continuaient de gigoter tout du long du tunnel. C'était comme si la pièce elle-même réagissait aux sentiments d'Ayame et Kenji... Ayame et Kenji qui l'un comme l'autre n'avaient pas l'air de guère se soucier de leur nudité, au grand dam d'Esmé.

En parlant d'Ayame, la jeune femme semblait soudain absente. Elle avait l'air d'essayer de se remémorer des souvenirs qui lui faisaient défaut...

"Uni... versité? Ho... ku... bu..."

Étonnamment, ce fut le tour de l'homme de prendre la parole. Il n'aurait pas du se sentir concerné par la discussion... Et pourtant, il répondait comme si Esmé s'était adressée à lui tout autant qu'à Ayame. C'était vraiment comme si ils ne formaient qu'un...

"Je suis... Ayame? Keita... Je suis... "

Brève grimace de souffrance... Esmé pouvait ressentir d'ici un fouillis mental monstre, dans... l'esprit commun de ses interlocuteurs? C'était un mélange de souvenirs flous... De doutes, d'incertitudes. Des images somme toute banales... Des cours, au sein desquels Ayame semblait plus intéressée par ce qu'il se passait par la fenêtre que par ce que racontait le prof... Des flirts, avec Kureno... Des bagarres... Et d'autres images qui s'y entremêlaient, nettement plus effrayantes. Le feu... Un fleuve rouge, lumineux, dans un univers qui semblait tout sauf terrien... Les corps haineux de démons en action, au travers une vision floue... Le noir, l'emprisonnement... Le cliquetis des chaînes. Puis la jouissance d'être au dessus de tous, ses vassaux à ses pieds... Puis...

Les deux voix d'Ayame et Kenji qui se mêlaient, donnant véritablement l'impression qu'ils avaient... fusionné? La peur déformait leurs traits.

"Où suis-je...... Qui... suis-j.."

Leurs deux corps se crispèrent, l'un se resserrant contre l'autre. Leurs paupières, fermement closes... Puis un cri atroce qui s'échappait de leurs deux gorges, tandis qu'ils semblaient comme... Aspirés par la porte? Oui... Ils étaient en train de disparaître au travers. Bientôt, ne restèrent plus que leurs deux mains qui au travers la matière du battant tentaient vainement de s'accrocher au chambranle. Les mains lâchèrent. Esmé eut juste le temps de les voir comme... Se mêler? En tous les cas, deux secondes après, il n'y avait plus qu'une seule main. Une main humaine... Mais une main d'homme, qui finit par disparaître totalement au travers de la porte. Le silence se fit. Il n'y avait plus rien, plus personne... Et les murs cessèrent de bouger. Les mains sur ces derniers arrêtèrent de se mouvoir. La matière blanche devînt grisâtre. Et un léger déclic retentit. Le loquet avait donc été déverrouillé?

Alors qu'Esmé tentait d'entrer en contact avec les deux êtres à l'air absent qui se tenaient nus devant elle, son clone disparut, s'effaçant de lui même puisqu'elle ne lui prêtait aucune attention. La pièce aussi semblait s'être calmé, les bras se mouvant plus doucement, moins agités.

"Uni... versité? Ho... ku... bu..."

Ben dis donc, si elle ne se souvient même pas de ça, on n'a pas finit, songea la jeune fille, un air désabusé s'affichant sur le visage. Et voilà que l'homme prenait la parole, n'ayant a priori pourtant pas grand chose à voir avec la conversation en cours...ou peut être que si, justement? La brune haussa un sourcil, quelque peu intrigué par ce manège qui se jouait devant elle. Tout ceci n'était peut être rien d'autre qu'une mascarade où personne ne portait de masques....Et sur le devant de la scène, se tenait Esmé, incapable de se souvenir de son texte, agissant à l'instinct, sous l'œil probablement moqueur du public, laissé dans l'ombre.

Quelque part, cela aurait presque plus de sens que tout ce qui s'était déjà passé. A moins qu'elle ne soit piégé dans un espace-temps différent du sien, ou je ne sais quel univers parallèle....Mais elle n'avait avoué qu'elle n'avait jamais vraiment cru à ce genre de théories des plus bizarres. Bien qu'elle ait de l'imagination à revendre, elle était tout de même assez ancré sur terre pour ne pas avaler toutes les sornettes et discours fumeux de prétendus scientifiques. Cependant, tout ceci ne l'avaançait guère désormais. Qu'il s'agisse d'un cauchemar ou de tout autre chose, une chose cependant était certaine: elle ne savait pas ce qu'elle faisait ici, ni où elle se trouvait.

"Je suis... Ayame? Keita... Je suis... "

"Comment ça...? Ayame est une femme, non?"

Pas de réponse à sa question pourtant censée, quoi qu'un peu idiote, peut être. Elle se mordit la lèvre inférieur tout en fronçant à nouveau ses fins sourcils noirs. Les deux personnages, ou peut être l'entité, semblaient confus.Une brève grimace de douleur. Puis un air d'incompréhension s'étala sur leurs beaux visages devenu inquiet. Esmé eut le souffle coupé par la vague de doute qui l'assailla subitement. Les deux presque inconnus semblaient des plus troublés, comme si ils ne se souvenaient de rien les concernant. Qu'était-ce que tout ceci? Leur identité propre paraissait elle même remise en question. La jeune fille se sentit perdue au milieu de tout ça, tentant vainement de ne pas se faire submerger.

Puis en choeurs, deux voix, l'une féminine, l'autre masculine:

Où suis-je...... Qui... suis-j.."

Enfin leurs yeux se fermèrent alors qu'ils poussèrent un cri, tentant vainement de se raccorcher l'un à l'autre. Et ils disparurent par la porte, alors qu'ils essayaient désespérement de se raccorcher au chambranle.
Esmé resta là un instant, les yeux grands ouverts. Elle battit des paupières une fois ou deux, chassant la main de lh'omme, seule sur sa rétine.

"Bon et bien...on dirait bien que la porte s'est ouverte."

Elle l'ouvrit donc et la franchit, quittant ces lieux pour d'autres peut être plus accueillant. Ce qui, à son avis, ne serait pas bien difficile, franchement.

*Et c'est reparti....*

Les paroles de cette jeune fille résonnaient dans son esprit embrumé. Elles rebondissaient au fil de ses pensées incohérentes, discontinues. Ayame... Une femme? Etait-elle Ayame? Etait-il Samaël..? Ses souvenirs lui semblaient flous... Etait-elle/il une entité réelle, une personne? Rien n'était moins sûr... Et si tout n'avait été que rêve? Et si cette souffrance qu'il/elle vivait n'était que pure fiction? Son impression était d'être non pas un individu de chair, mais un univers entier. Elle/il ressentait et voyait tout dans ce cocon étrange, sans dessus dessous. Des bribes échappaient à sa conscience, mais tout ce qui n'était pas regardé ni écouté était au minimum vu et entendu. Elle/Il était coincé dans cette zone à la fois vide et compacte, totalement grise, dans laquelle elle/il flottait... Elle/Il ressassait d'horribles sentiments dont elle/il ne connaissait même plus l'origine... Cette bulle de doutes pouvait-elle vraiment être percée?

Esmé avait donc franchit cette porte, à travers laquelle les corps d'Ayame et Kenji fusionnés s'étaient échappés. Elle n'eut pas le temps de voir ce qui se trouvait derrière, pour la bonne raison qu'une fois de plus, elle fut happée par l'univers hostile qu'elle parcourait. Elle fut comme tiré en avant par le nombril puis... d'un coup, tout s'arrêta. Elle n'était plus dans cette pièce complètement surréaliste... Elle n'était plus vêtue de ce vêtement glauque. Non... Elle se trouvait maintenant dans un bus, à Hokubu. Où du moins ce qui ressemblait à Hokubu. Elle avait retrouvé ses vêtements normaux, et même ses biens divers, tels que le livre qu'elle avait acheté pour son père. Les secousses du véhicule, le bruit de la circulation... Toute ces banalités normales avaient quelque chose de rassurant. Et pourtant, quand on y regardait à deux fois, tout n'était peut-être pas fini. Les voyageurs avaient tous l'air blasés au possible. Ils regardaient pour la plupart par la fenêtre, sans un bruit. Assis à une place isolée, Kenji était là. Il fixait le vide d'un air absent. Il avait retrouvé une allure humaine, autrement dit, n'avait plus de teint cuivré ni d'excroissances osseuses au niveau des coudes. Il était aussi habillé cette fois-ci. Un jean, une chemise noire... Rien d'indécent, ouf.

Mais restait à savoir ce qu'il fallait faire maintenant, non..?

Esmé avait franchit la porte sans hésiter. Après tout, il valait mieux quitter cet endroit malsain au plus vite, bien qu'elle ne sache pas plus où mènerait cette sortie. Peut être retournerait-elle au monde "normal", après tout. mais elle ne pouvait pas rester là pour autant. La sensation désagréable d'être tiré au niveau du nombril s'arrêta. Elle se trouvait à présent dans un bus, qui semblait tot ce qu'il y a de plus normal...du moins à première vue. Méfiante, la jeune fille regarda prudemment autour d'elle.

Tout semblait normal. Elle avait retrouvé ses vêtements, son sac et même le livre qu'elle avait récemment acheté pour son père. Quelque part elle espérait que cet achat en vaudrait la peine, sinon ce serait le comble, franchement. Parce que si elle n'était pas resté aussi tard en vielle, elle n'aurait peut être jamais croisé cette flaque rouge et n'en serait pas là. Bon, ça neservait à rien de regertter ça maintenant. Il fallait déjà savoir où le bus les emmenait.

Regardant avec attention tout autour d'elle, elle nota avec un mécontentement grandissant (qui s'accompagna d'un forncement de sourcil) que les personnes occupant le bus étaient toutes étrangement calmes. Pas un bruit hormis celui de la circulation et bien sûr, celui du moteur. Tous regardait par la fenêtre, le visage impassible, presque blasé. Esmé s'interogea un instant. Etait-ce la réalité, ou tout ceci faisait-il encore parti de l'espèce d'espace étrange qu'ele avait déjà parcouru?

Bougeant un peu, elle remarqua Kenji vers le fond du bus. Il avait l'air humain, cette fois ci. Et heureusement, il était habillé. Esmé le rejoignit en quelques enjambés et s'assit à la place libre à côté de lui. Songeant qu'il ne la reconnaitrait probablement pas, elle se lança, afin d'être certaine de l'endroit où elle se trouvait à présent:

"Bonjour, excusez moi..Est ce que vous savez où va ce bus au juste? Je suis montée sans faire attention au numéro..."

inventa-t-elle. Après tout, on n'était plus à ça près. La jeune fille en profita pour jeter un oeil par la fenêtre, afin de voir si elle reconnaissait quoi que ce soit. C'était en effet possible qu'elle se trouve simplement encore en ville.

Le jeune homme sembla tout d'abord ne pas réagir. Il avait décidément l'air à côté de la plaque... Mais finalement, il daigna tourner les yeux... Puis la tête, légèrement. Tout ça pour enfoncer son regard clair dans celui d'Esmé. A première vue ce regard semblait juste vide, mais, à condition d'être observateur, on se rendait vite compte que ce vide était en fin de compte l'expression d'une détresse profonde... Si profonde en fait, qu'elle était devenue comme un trou béant, qui semblait abrutir complètement l'interlocuteur roux de la demoiselle. D'ailleurs, Esmé était aux première loges pour capter les sentiments du jeune homme qui lui faisait face. C'était un mélange étrange de solitude, de peur... Non. D'effroi total, et de désillusion.

Dehors, Esmé put voir.. Hokubu, ni plus ni moins. La ville n'avait rien d'étrange. Elle était égale à elle-même, ses quartiers ressemblaient à ce à quoi ils avaient toujours ressemblé. Vraiment, on se serait cru de retour dans la réalité, et pourtant...

"... Le numéro? Quelle importance... Tous les bus ont la même destination de toutes les manières."

Il détourna son attention d'Esmé, et soupira, visiblement blasé. Il appuya sa tête contre la vitre du bus. Il s'était passé quelque chose d'étrange, ce faisant... Alors que quelques secondes seulement s'étaient écoulées, alors que le bus n'avait pas fait d'arrêt, les passagers semblaient ne plus être les mêmes... Ou plutôt... Non. Il s'agissait des mêmes passagers... Quelques secondes avant cela, un enfant regardait par la fenêtre, sur les genoux de sa mère. Il semblait s'être changé plus vite que de raison en un adolescent qui était dorénavant assis à côté de la jeune femme... Dont les cheveux commençaient à grisonner. Un ex-trentenaire accroché à une barre près d'Esmé et de Kenji commençait à ployer sous le poids de l'âge. Des rides sillonnaient son visage fatigué. Une vieille femme qui quelques instants avant avait eu soixante-dix ans était désormais frêle et flasque. Sa peau parcheminée et tâchée par la vieillesse trahissait sa faiblesse. Les yeux fermés, sereinement appuyée contre le dossier de son siège, elle avait visiblement cessé de respirer. Seuls Kenji et Esmé semblaient être épargnés par ce vieillissement accéléré... Les yeux du jeune homme restaient fixement tournés sur le paysage immuable qui s'étendait au travers la vitre du bus. Une peur glacée les habitait.

Ce n'était pas bon du tout, ça. Esmé se sentait saisie par la solitude qui émanait de Kenji. Cela dit c'était plus fort que ça. Peu à peu, la jeune fille se laissa sombrer dans le désespoir. Après tout, rien n'avait d'importance.
Plus rien. La peur l'envahissait par vagues successives. Un instant elle songea à se détourner de la vitre, où Hokubu défilait tranquillement et de Kenji, mais elle n'y arrivait tout simplement pas. Les quelques mots de Kenji lui permirent de reprendre pied, surnageant vaguement au dessus des émotions qui lui parvenaient violement.

"... Le numéro? Quelle importance... Tous les bus ont la même destination de toutes les manières."

"Kenji? De quelle distination parles tu?"

Pour maintenir à distance ces émotions, il valait mieux qu'elle parle et qu'elle bouge. Elle se leva donc, et constata avec horreur le viellissement acceleré des personnes qui l'entourait. Seul Kenji et elle semblaient épargnés....

"Qu'est ce qu'il se passe par ici, bon sang! Kenji viens, il vaudrait mieux descendre."

Parce que si le conducteur suivait le même trajet que le reste, bientôt il n'allait plus être capable de conduire. Elle attrapa donc le jeune homme par le poignet, afin de l'obliger à se lever. Il fallait qu'elle se concentre sur ce qu'elle faisait pour ne pas se laisser envahir par la peur. Heuresement, pour l'instant elle parvenait à garder la tête froide.

Oui... Un jour, il n'y aurait plus personne. Ses seules raisons de vivre étaient bien fragiles... Kureno avait disparu, et peut-être était-il mort. La vie d'Imako ne serait pour elle qu'une fraction de seconde, et de toutes les manières elle n'allait pouvoir rester longuement impliquée dans l'existence de sa jeune soeur: son corps que le vieillissement n'affectait pas ne le lui permettrait pas. Angra? L'immortalité était-il vraiment l'un de ses attributs? Elle doutait suite à ce qu'il lui avait dit... Et de toutes les manières, un jour, il partirait. Elle le savait... Malgré l'attachement, un jour il retournerait dans son monde, pour s'occuper d'affaires vengeresses qui la dépassaient, quoiqu'elle lui ait proposé son aide avec toute la sincérité dont elle était capable. La raison avait été vaincue par des sentiments qu'elle ne contrôlait guère. Un jour, peut-être sa seule option serait d'assumer pleinement l'existence démoniaque qu'elle était devenue... Et sans doute lui faudrait-il retourner au Zohar, quand plus rien ne la retiendrait sur Terre... Mais... que..? Ces pensées... De qui étaient-elles..? La conscience de l'entité s'étiolait... Ou plutôt redevenait floue. Les idées se mélangeaient... Le regard d'un certain jeune homme coincé dans un certain bus se vida d'autant plus.

"Kenji? De quelle destination parles tu?"

Kenji cligna des yeux. Il ne semblait pas bien comprendre la question... Ou du moins ne pas en comprendre l'intérêt, comme si la réponse lui semblait évidente. Ses yeux, mornes, se tournèrent sur Esmé une fraction de seconde.

"De quelle destination veux-tu que je parle si ce n'est du terminus? Mais je ne peux pas l'atteindre alors si tu veux y aller tu ferais sans doute mieux d'aller voir ailleurs..."

Même dans un monde onirique où ses propos étaient sans dessus dessous, on était visiblement pas protégé de la mauvaise humeur du jeune homme connue pour être relativement méchante et dure à encaisser. Pourtant, comme surpris, il s'arrêta de parler, pour balayer la populace du bus du regard. La vieille femme était devenue un squelette qui commençait à tomber en poussière, la mère de l'adolescent qui devait maintenant avoir la quarantaine avait de longs cheveux blancs et sans doute plus beaucoup de dents... L'homme qui se tenait à la barre tremblait. Il n'avait presque plus de cheveux, la peau de son visage tombait et ses yeux voyaient mal sous les couches de graisse ridée qui les recouvraient. Kenji ressentait une horreur froide qui lui glaçait les sangs visiblement. Cette vision avait tout l'air de lui être insupportable... Ce pourquoi, peut-être, il laissa Esmé attraper son poignet. Hagard, il se prit à l'observer à nouveau... Il avait l'air très étonné par son comportement... A croire que ça faisait un moment qu'il n'avait pas vu de véritable être vivant, doué d'une capacité de décision.

"Où veux-tu aller franchement..? Il n'y a pas d'alternative..."

Il se releva pourtant, comme attiré par la vie qui se dégageait d'Esmé. Vie qu'il semblait perdre à nouveau, pourtant, alors que sa flamme d'intelligence était en train de s'étioler... Et ses épaules de s'affaisser.

"De quelle destination veux-tu que je parle si ce n'est du terminus? Mais je ne peux pas l'atteindre alors si tu veux y aller tu ferais sans doute mieux d'aller voir ailleurs..."

Esmé fronça les sourcils à la réplique pas très sympathique du jeune homme. Quelque part, on pouvait dire que sa réserve habituelle et sa timidité l'avaient abandonné. Il faut dire qu'Esmé plus jeune, n'avait jamais été très timide quoiqu'un peu plus réservé que la moyenne, sans doute.
Non cette timidité était venue plus tard, suite à son éloignement progressif des gens. En réalité Esmé était quelqu'un de volontaire, prête à agir de son propre chef.

"Où veux-tu aller franchement..? Il n'y a pas d'alternative..."

"Ca c'est ce que tu crois. Il y a toujours une alternative." répliqua la jeune fille, tout en le tirant à elle. ElLe tenait toujours par le poignet, tentant d'ignorer cette sorte de torpeur typique de l'abandon qui menaçait de s'enparer d'elle. Il fallait absolument avancer, que ça plaise ou non à l'autre idiot. Son petit frère Gabriel aurait sans doute dit que tout ceci ressemblait à un jeu vidéo. Qui dit jeux vidéos dit héros, et donc il y avait une chance qu'ils s'en sortent non?

Penser à son frère, et au comportement désespérant de Kenji qui avait le don de l'agacer lui permettait d'ignorer ce qui se passait autour d'elle. Quant aux émotions négatives du jeune homme, elles s'estompaient pour un temps, restant tout de même à la lisière de sa conscience (ou quelque chose d'approchant).
Ainsi elle avança rapidement à une porte, appuyant à un bouton pour voir si le bus s'arrêtait à un arrêt. Si ce n'était pas le cas, elle allait sans doute tenter d'ouvrir les portes afin de sortir en pleine marche. C'était dangeureux, mais sans doute pas tellement plus que de rester là.

Quelque part, Kenji eut l'air de réfléchir à ce qu'Esmé venait de lui raconter. C'était subtil, mais le doute avait recouvert ses prunelles claires... Un certain étonnement, peut-être, aussi. Avait-il seulement été capable d'envisager cette réponse durant ses minutes de torpeur gelée, passées dans le bus...? A en croire sa réaction, non. Il avait du se cantonner aux solutions pessimistes à son mystérieux problème. Du coup il avançait sans résister. Mais l'expression encourageante qu'il arborait ne dura guère, bien vite remplacée par un sourire désabusé, qui tenait plus du rictus que d'autre chose, d'ailleurs.

"Tu ne sais pas de quoi tu parles."

Mais peut-être que même en ne sachant pas de quoi elle parlait, elle tenait une vérité première, non..? Le voile de doute réapparut, pas assez pour être clairement distinguable ceci dit.

¤Si rien ne va plus il suffira de faire semblant de mourir... La poussière n'a jamais été rien d'autre qu'inconsciente, après tout.¤

Une pensée volatile qu'Esmé comme Kenji devaient avoir captée. La pensée n'était pas un son. Elle n'avait pas de voix, ni de timbre. Il s'agissait juste d'une suite de mots dégringolant les uns après les autres, s'imposant dans l'esprit déjà bien embrumé des personnes en présence. Kenji eut un sourire pâle, mais confiant. C'était vrai... oui. Dans le bus, l'ensemble des passagers était maintenant réduit à l'état de squelette, mais il ne les regardait plus.

Le bus ne faisait pas d'arrêts. Ainsi le voyant lumineux "arrêt demandé" qui s'était allumé à la pression d'Esmé sur le petit bouton rouge semblait n'avoir... aucune utilité. Derrière elle, Kenji soupira, se redressa, et sembla se réveiller, tandis qu'il passait une main dans sa nuque. Chose étrange... Si Esmé se retournait, si elle levait la tête, un miroir rond et bien placé lui indiquerait que le siège du conducteur était... vide, et ce visiblement depuis le début. Le bus se déplaçait tout seul.

"Tu veux vraiment sortir d'ici?"

Le regard morne, mais cette fois-ci douloureusement vivant de Kenji, se figea dans celui de la jeune femme. Il récupéra la main qu'elle tenait, ayant l'air de vouloir en faire quelque chose. Sa main gauche resta vaguement en suspens tandis qu'il attendait une réponse. Que comptait-il faire?

De nouveau Kenji semblait indécis. Décidément, qu'est ce que ce garçon était mollasson! Emsé espérait qu'il était un peu plus vivant dans la réalité...Puisque tout ceci semblait encore une fois sortir d'un cauchemar. Et "vivant" était bien le terme.

"Mais si, je sais de quoi je parle! De toute façon c'est pas en restant là qu'on va avancer, ça c'est sûr..."

La jeune fille fut interrompu dans sa tentative de motivation des troupes (assez restreintes, il est vrai puisqu'ils n'étaient que deux) par une voix sans timbre....Les mots semblaient provenir de nulle part, nota la brune avec inquiétude.

¤Si rien ne va plus il
suffira de faire semblant de mourir... La poussière n'a jamais été rien
d'autre qu'inconsciente, après tout.¤

Et voilà que le roux avait reprit son attitude amorphe, à croire qu'il était sous anesthésiant. Mais Esmé n'allait pas le laisser tranquille pour autant. Après tout, il y avait de fortes chances pour qu'il soit sa seule chance de salut, d'après les quelques déductions qu'elle pouvait faire à présent. C'était tout comme elle, quelqu'un qui existait et qui semblait réagir (un peu) à ce qu'elle racontait. Et puis il lui était déjà apparu dans le "rêve" précédent....Si tant est que tout ceci ne soit qu'une succession de rêves...ou plutôt de cauchemars!

"Oui, je veux sortir, et toi, tu vas venir avec moi. C'est pas vrai..." ajoutat-elle pour elle même, incrédule tout en notant le siège vide du conducteur.
"Bon tu viens ou il faut que je te traîne?" demanda-t-elle au jeune homme, l'air vindicatif.

L'agacement d'Esmé semblait glisser sur Kenji comme l'eau sur une surface imperméable... Il ne répondait pas, et ne cilla même pas tandis qu'elle le contredisait, à croire qu'il jugeait cela inutile. Elle savait de quoi elle parlait. Eh bien tant mieux, si ça pouvait lui éviter de douter... En tous les cas, Kenji avait légèrement levé la main en direction de la porte du bus, avant de poser une question à Esmé. Était-il aussi amorphe que ce qu'elle pouvait bien penser, ou bien était-il seulement assailli par un nombre de perceptions incalculable, voire absolument inconcevable pour l'humain lambda..? Après tout c'était en un sens comme si il était là et tout à la fois ailleurs, quand bien même il semblait s'agir d'une personne réelle, faite de chair et d'os, disposant d'un cerveau à peu près disponible, ou tout de moins de ce qui y ressemblait dans ce monde onirique.

Était-elle sûre de vouloir sortir? Question dont la réponse semblait évidente pour Esmé. Nettement moins pour Kenji. Car on pouvait se demander ce que leur réservait l'extérieur. Il assimila le choix d'Esmé rapidement, et dès qu'il fut formulé, tourna la tête face à la vitre. Ca n'avait pas l'air de le réjouir, mais il était prêt à donner satisfaction à la jeune femme...

"Bon tu viens ou il faut que je te traîne?"

...Qui ne semblait pas vouloir s'arrêter de se plaindre. A croire qu'elle le prenait pour un mollusque incapable d'agir... Si c'était bien le cas, elle risquait d'être surprise, car le jeune homme - ou bien ce qui y ressemblait - était sans doute nettement plus instable, voire imprévisible, que ce qu'il laissait penser. Kenji soupira, comme agacé. Il tourna un regard peu amène sur la jeune femme. Ce fut sur un ton un peu sec qu'il répondit, cette fois:

"Tais-toi deux secondes et recule, tu veux bien?"

Il n'attendit pas bien longtemps qu'elle s'exécute, pourtant. Sa main se tendit plus franchement en direction de la vitre. Soudain, il fit chaud. Un air brûlant se glissa sous les paupières d'Esmé, capable de la faire cligner des yeux si ce n'est pleurer. Une gerbe de flammes venait d'exploser contre la porte du car, éjectant quelques nuées d'étincelles ici et là, et illuminant le véhicule d'une lueur "orangêatre" qui rendait la scène nettement moins banale qu'auparavant - à considérer qu'un car rempli de cadavres en putréfaction ait quelque chose de banal. L'origine du feu semblait bien être la main tendue de Kenji, aussi bizarre cela puisse paraître: en effet, elle semblait avoir servi de lance-flamme.

Il n'avait pas l'air d'avoir mis assez de sauce, pourtant. Une seconde explosion retentit, projetant de nouvelles étincelles à gauche et à droite. La chaleur avivée prenait à la gorge... Cette fois-ci, la porte s'éjecta dans un boucan abominable, et fit un vol plané sur le trottoir, avant de le rejoindre dans un crissement de métal tout aussi désagréable. Tout ça n'avait pas l'air d'avoir grandement choqué Kenji, qui ne laissa même pas à Esmé le temps de dire ouf. Que ça lui plaise ou non, il lui attrapa la main, et alla jusqu'à ceindre sa taille, avant de s'avancer en direction de la sortie, et de bondir à l'extérieur du bus qui roulait encore, bien évidemment. On aurait pu croire que Esmé et Kenji récolteraient quelques roulés boulés pour cet acte "héroïque"... et pourtant, non. Le sol devint soudain étrangement adhérent... La gravité, étrangement faible. Kenji et Esmé retombèrent accroupis, proprement, comme on ne peut le faire que dans un rêve. Le grondement du bus s'éloigna, puis s'éteint. Il s'était évanoui dans la nature... Au sens littéral du terme. Le véhicule, alors qu'il s'éloignait, était devenu transparent, de plus en plus inaudible... Jusqu'à totalement disparaître. Kenji lâcha Esmé, puis appuya une main sur son genou, tandis qu'il relevait la tête, et observait les alentours avec un air plus éveillé qu'il ne l'avait eu jusque là. C'était Hokubu oui... Hokubu, égale à elle-même, ou presque, si l'on oubliait quelques petits détails pas nets comme un bus qui disparaissait comme par magie, ou encore des lois physiques devenues drôlement conciliantes...

"Bon... Ca te va? Maintenant sache que tu te balades dans mes souvenirs, et je peux pas t'assurer que ça soit de tout repos. T'as de la chance de m'avoir trouvé... Je dois être la seule part de raison qui lui reste... Enfin. Qui ME reste, j'imagine..."

Il s'arrêta, interloqué. Puis il se tourna pour observer Esmé des pieds à la tête, comme si c'était la première fois qu'il la voyait. A croire qu'il venait seulement de se réveiller... Sa présence semblait soudainement l'intéresser au plus haut point...

"Tu es réelle hein..? Tu as trouvé la larme, tu l'as touchée?"

Si Esmé n'avait aucune idée de ce qu'elle faisait ici, il avait l'air d'être bien informé lui par contre...

Kenji semblait cette fois ci décidé à faire quelque chose. Il invita la jeune fille à reculer, ce qu'elle fit bien volontiers. C'est alors qu'il projeta une flamme contre la porte, ou quelque chose de ce style. La brune n'avait pas bien vu, mais elle se recula un peu plus, n'ayant pas trop envie de se faie carboniser "par inadvertance". En effet on aurait dit que la jeune homme réagissait enfin à ses piques...ou à son côté désagréable, au choix.

Enfin la porte céda face aux flammes, attérissant contre le sol dans un bruit épouvantable.

Esmé n'eut pas le temps de protester que le roux la saisit par la taille et sauta hors du bus.
"Aaah! Ah?" fit-elle, constatant avec soulagement qu'ils avaient rjoint le sol sans dommage. Une preuve de plus que cet endroit était fort étrange.

"Bon... Ça te va? Maintenant sache que tu te balades dans mes souvenirs, et je peux pas t'assurer que ça soit de tout repos. T'as de la chance de m'avoir trouvé... Je dois être la seule part de raison qui lui reste... Enfin. Qui ME reste, j'imagine..."

Esmé hocha la tête, incrédule. Et pourtant, tout s'expliquait! Cela dit, la vie d'Ayame ou Kenji, elle ne savait pas, ne devait pas être facile, en vue de ce que ses souvenirs contenaient.

"Tout s'explique" lança-t-elle d'un ton désinvolte. Mais si ce n'était pas un rêve, comment allait-elle sortir d'ici? Sûrement que la "dernière part de raison" allaitpouvoir l'aider. Soudain, Kenji se mit à l'observer attentivement, comme si c'était la première fois qu'il la voyait. C'était peut être le cas, d'ailleurs, mais cette inspection n'enchantait guère la jeune fille, qui fronça les sourcils un instant avant de se reprendre et de tenter d'afficer un sourire amical.

"Tu es réelle hein..? Tu as trouvé la larme, tu l'as touchée?"

"Oui je suis aussi réelle que toi...enfin d'après ce que j'ai compris. J'ai une existence dans le monde réel, si c'est ce que tu veux savoir. Euh, oui, j'ai trouvé une larme et je l'ai touché.... J'aurais mieux fait de m'abstenir, j'imagine?" conclut-elle avec un air désabusé. Sa colère avait finit par s'estomper, et franchement, tout ce qu'elle désirait c'était de sortir d'ici.

Après les boues de feu et autres pouvaient bien attendre plus tard une quelconque explication.

Le silence se prolongea un peu suite à la déclaration d'Esmé. L' "apparition" de Kenji semblait prendre en force, en vitalité... en... réalité? Une sensation du... troisième type, dirons nous, permettait en effet d'affirmer que progressivement, son existence était de plus en plus forte. Comme si il était lentement mais sûrement en train de pomper ce monde tout autour de lui qui semblait mû par une volonté propre. Finalement il soupira, puis secoua la tête, comme exaspéré.

"Tu crois pas si bien dire... Tu t'es fourrée dans quelque chose dont t'as même pas idée. Et je peux pas t'en donner la teneur... Je me suis jamais retrouvé dans cette situation."

Il se releva, et tendit sa main à Esmé au cas où elle ait envie de la prendre pour s'aider à se relever. Sinon, il la récupérerait sans un commentaire. Il avait l'air d'essayer de se concentrer, ce qui lui était à première vue difficile. Il essayait d'expliquer une situation qui à l'évidence était extrêmement complexe.

"Bon... Cette larme que tu as touché, c'est une partie de moi, ok..? C'est un peu compliqué donc je te passe les détails... De toutes les manières j'arrive pas à me souvenir des détails, je ne suis pas une part suffisante de moi-même pour accéder à mes propres souvenirs... C'est pathétique, quand j'y pense. Je sais juste que c'est compliqué."

Petit sourire en coin, tout à fait acide, qu'il se réservait à lui-même ceci dit. Et il continua. Chouette... Ca faisait longtemps que personne n'avait parlé si longuement à Esmé. Enfin une bribe de discours censé dans toutes cette pagaille énigmatique et complètement incohérente.

"Il s'est passé quelque chose dans ma vie vraisemblablement qui m'a fait perdre toute envie de m'y accrocher. Je sais pas trop ce que ça peut bien être... J'imagine, un collier de catastrophes collées les unes derrière les autres sans espoir de rémission... Sinon je vois pas. Je suis pas du genre à abandonner si facilement, et vu l'état dans lequel tu m'as retrouvé..."

Un instant ses yeux reprirent la teinte de la tristesse insondable que Esmé avait déjà expérimenté. Un désespoir si profond qu'il était capable de saper jusqu'à la moindre miette d'énergie vitale... De couper l'existence à sa racine: de faire perdre l'envie d'Etre. De rendre inutiles la force et la dignité. Le genre de sentiment qui mettait à genoux même les plus fortes personnalités. Pourtant ce sentiment ne submergea ni Kenji, ni Esmé. Elle put par contre sentir une vague de curiosité calme, d'interrogation, qui ne venait pas d'elle-même, mais bel et bien de son interlocuteur. Il continuait de regarder plus loin, cherchant comme à sonder les ténèbres dans lesquelles étaient plongées les plus petites rues d'Hokubu qui s'offraient à eux.

"En bref j'ai laissé la larme m' aspirer et elle s'est servie de mon désespoir et de mon énergie vitale pour créer ce... monde. Tout ce qui est autour de toi fait partie de moi. Mes souvenirs s'y baladent librement. J'avais l'intention de laisser couler... Mais maintenant que tu es là et que tu m'as remis la tête sur les épaules c'est différent. On va sortir d'ici... Si j'arrive à aspirer suffisamment de souvenirs et d'énergie, je devrais devenir une part suffisante de moi-même pour me rappeler comment détruire l'illusion créée par la larme et retourner sur Terre... Et p... ?!"

Il s'arrêta, pour la bonne raison qu'il se passait quelque chose d'imprévu. Le bitume sous ses pieds et sous ceux d'Esmé était pendant qu'ils parlaient devenu... Malléable. Un peu trop, même. D'un coup ils s'enfoncèrent dans la mélasse jusqu'aux genoux, comme si il s'était agi de sables mouvants.

"Eh!! Conneries de souvenirs récalcitrants! Depuis quand ils prennent le droit de me couper?!! On dirait que je suis pas encore une part suffisante pour les contrôl... blup... On se retrouve... Tout à l'..."

Et les lianes de bitume liquide qui s'éjectaient du sol pour s'enrouler autour de Kenji finirent par totalement le recouvrir... Son corps disparut au travers du sol, comme avalé par une plante carnivore. Les même lianes vinrent bientôt couvrir le corps d'Esmé. Elles étaient froides, voire glaciales. Leur contact gelait jusqu'aux os... de se débattre ne faisait que accélérer leur progression. Puis tout fut noir. Puis d'un coup Esmé fut tirée vers le bas, et paf. Elle se retrouva dans une pièce grise, sans issue, et carrée. Elle y était seule... En compagnie d'une petite larme blanche et lumineuse qui tenait dans la paume et flottait au milieu de la pièce.

[Je fais court, désolé!]

Esmé écouta attentivement Kenji, qui semblait avoir retrouvé ses esprits en quelque sorte...Enfin c'était compliqué comme situation. Le jeune homme ne semblait pas avoir retrouvé la pleine mesure de ses souvenirs, ou peut être même de sa personne...c'était difficile à dire, pour l'un comme pour l'autre. La jeune fille laissa échapper un faible soupir. Bien entendu qu'elle aurait mieux fait de s'abstenir. Si elle n'avait pas fait cette chose des plus idiotes et inconsidérée, elle serait sans doute maintenant de retour à l'université, tranquillement dans sa chambre à réviser ou lire un livre après avoir été manger au restaurant universitaire.

Ce n'était pas comme si ce programme était des plus passionants, mais il avait au moins le mérite de ne pas être dangeureux. Bref. De toute façon, à ce qu'elle comprenait, le jeune homme était encore sa meilleure chance de sortir d'ici. Elle lui laissa un regard plein d'espoiir alors qu'il réfléchisait. Les beaux yeux de Kenji semblaient refléter une profonde tristesse, mais l'empathe ressentait surtout la curiosité qui l'animait à présent.

C'était autrement plus agréable, bien que ce soit toujours autant dérangeant, songea-t-elle.

"Tu te souviendra peut être plus tard de ces évènements... Mais pour l'instant le principal est de se tirer d'ici, pas vrai?"

Elle lui fit un petit sourire engageant. Après tout ils étaient tout deux fourrés dans la même galère... D'alleurs comme si ce n'était pa suffisant, le sol choisit cet instant pour se dérober sous eux, devenant semblable à de la mélasse, ou tout autre substance du genre. Ils en eurent vite jusq'aux genoux, et cela ne semblait pas près de s'arrêter.

"Eh!! Conneries de souvenirs récalcitrants! Depuis quand ils prennent le droit de me couper?!! On dirait que je suis pas encore une part suffisante pour les contrôl... blup... On se retrouve... Tout à l'..."

"Et ça recommence... Kenji...!"

Esmé allait pousser un grognement de frustration lorsqu'elle disparut elle aussi dans le sol, attirés par les lianes froides qui s'accrochaient à elle. Elle tenta un bref instant de se débattre, mais cela ne servit à rien, hormis à accélerer le processus.... Tout était noir, subitement.

La jeune fille attérit durement dans une pièce carré, vide et blanche. Enfin, si on exceptait la larme lumineuse qui flottait...Elle se releva donc et tâta les murs, à la recherche d'une possible issue. Puis se décida à s'approcher de la larme. Elle appella:

"Kenji? Il y a quelqu'un? "

Elle examina plus attentivement la larme, et se dit qu'au point où elle en était.... Esmé s'appréta donc à la prendre dans sa main gauche. Peut être que c'était utile.

Bien... Après avoir frôlé l'espoir d'obtenir un "compagnon de voyage" à peu près sain d'esprit, et qui plus est plus informé qu'elle à propos du monde onirique dans lequel elle évoluait, la jeune femme retombait à la case départ. Une pièce grise, sans porte ni fenêtres... Comme une boîte hermétique, qui contenait une petite larme blanche, laquelle lévitait sous le nez d'Esmé.

Et bien entendu, Esmé commençait à prendre le genre de réflexes que ce monde impliquait. "Touche ce qui te semble étrange ou dangereux". Un acte digne d'un personnage de jeu vidéo... sauf qu'Esmé n'aurait certainement pas la chance de faire reset si elle obtenait un game over. Mais tout cela ne ressemblait-il pas au donjon le plus bizarre, et le plus malsain qu'il put être donné de voir?

A peine eut-elle frôlé la petite larme blanche qu'une lumière plus blanche encore, aveuglante, l'entoura. Elle eut l'impression d'elle-même léviter... Puis de tomber à toute vitesse. L'univers blanc devint rapidement grisâtre... Puis gris... Puis plus foncé encore... Puis anthracite. Enfin, ses pieds rebondirent sur une matière entre l'élastique et le cotonneux, qui semblait servir de sol. Son corps était devenu à moitié transparent.

Du sol anthracite s'élevaient de longues volutes noires, comme impures, qui parfois se détachaient du sol et voguaient dans cet atmosphère lourde. Pourtant lorsque Esmé respirait, il lui semblait qu'elle n'aspirait que des bouffées d'air frais... Comme si entre ce qu'elle voyait et ce que son corps pompait, il y avait une différence. Comme si ce qu'elle voyait n'était qu'un hologramme, et que la réalité n'était pas celle que ses yeux captaient.

Quelques particules blanches tombaient du "ciel" gris, plus clair que les profondeurs où Esmé reposait. On aurait dit comme une nuée de flocons blancs surnaturels... La plupart n'arrivaient pas jusqu'en bas, et disparaissaient dans une couche bien plus haute de cet univers étrange. On pouvait voir des espèces de sphères glauque flotter. Leur couleur était terne, vitreuse. On aurait dit comme des âmes mortes... Comme des âmes en décomposition. Ou du moins des âmes défaites de leur essence. Puis il y eut un bruissement... ou plutôt, un léger bruit métallique. Comme des chaînes qui tintaient... Comme des plaques de métal rouillées, qui se seraient entrechoquées.

Si Esmé regardait bien, à quelques mètres de là se trouvait un individu d'allure effrayante... Mais peut-être était-ce que qu'on avait fait de lui, qui était effrayant, plus qu'autre chose: l'homme au physique parfait était assis, ou plutôt agenouillé, prostré. Il était vêtu de loques... Des vêtements grossiers, déchirés, qui semblaient vouloir gâcher sa prestance naturelle. C'était pourtant raté: même ainsi, on sentait sa magnificence retenue. Des plaques de métal fixées autour de ses poignets, ses chevilles, et même sa nuque, étaient liées à de lourdes chaînes, qui n'avaient pas besoin de boulet pour être presque impossibles à soulever... A se demander de quelle matière elles étaient faites. Les chaînes traînaient par terre, tandis que le pauvre être tentait de bouger ses membres. On ne lui avait pas même permis d'avoir un visage. Sur ce dernier, un masque de métal blanc. Le masque était lisse. Complètement neutre. Pas de trous pour les yeux. Pas d'orifice pour la bouche ou le nez. Pas même un relief pour imiter la forme d'un visage humain... Il s'agissait d'un masque vierge, comme si l'existence même de la créature était interdite. Les longs cheveux rouges de l'homme coulaient contre son dos, et glissèrent sur ses reins tandis qu'il relevait la tête, difficilement. Il regardait le ciel sans le voir puisqu'il devait sans doute être aveugle, sous ce masque. Il leva un bras, tirant sur ses chaînes, lourdes... Un bras vers le ciel, qui retomba contre son masque, alors qu'il tentait de lever son second bras, et de poser sa main contre le visage de métal, pour tenter de l'arracher. En vain. Un gémissement déshumanisé. Toutes les "sphères glauques" qui passaient trop près de la créature semblaient comme aspirées par son corps.. Elles disparaissaient, en se fondant en lui. Des volutes noires, comme mues d'une volonté propre, tournaient autour de lui amoureusement. De grandes ailes gris perle dans son dos semblaient vouloir dire qu'il n'était pas humain... Crispées, tremblantes, elles était plus expressives que tout le reste de son corps. On entendait sa respiration difficile. L'air impur de ce lieu qui ne semblait pas avoir d'effet sur Esmé n'épargnait pas tout le monde finalement...

Dans la main d'Esmé, la petite larme blanche trônait. A croire qu'elle pourrait servir à quelque chose...

[Voici un lien qui pourra te servir pour visualiser la scène:
http://www.annwvyn.tonsite.biz/testBB/univers/eden5.html#geographie
présentement, Esmé se trouve dans la Zone Grise, ou du moins quelque chose qui en a l'apparence Razz

]